Ca pour une surprise ! [PV]

Ah, la plage de l’île…C’était probablement l’endroit qu’elle préférait ici. La mer était le seul rempart qui les séparait du monde extérieur, du "vrai monde". Et puis ça lui rappelait son passé, San Fransisco. Ca lui rappelait sa liberté, et elle adorait cette sensation. Humant à pleins poumons l’air frais, Bethany s’arrêta et ferma les yeux. Elle aurait pu rester là des jours et des jours, loin des tensions du pensionnat. D’ailleurs, depuis son arrivée, deux ans plus tôt, elle connaissait l’endroit par cœur vu le temps passé sur le sable et les cailloux.

Rejoignant un espace où disparaissait le sable au profit de galets et rochers, un détail inhabituel attira son attention. S’approchant d’un gros rocher, elle vit, cachée juste derrière, une caisse. En fronçant les sourcils, curieuse de savoir ce qu’elle contenait, la pensionnaire s’agenouilla. La caisse était fermée, attaquée par les vagues récurrentes, et semblait plutôt lourde. Comment avait-elle pu arriver là ? Seules des inscriptions - en russe ou d’un autre pays de l’Est, Bethany ne savait pas faire la différence – étaient visibles dessus. Elle sortit son couteau de son pantalon et s’attaqua à la caisse. Après quelques minutes d’efforts, elle réussit enfin à soulever le couvercle. Et là : surprise. Bethany afficha un sourire ravi : la caisse contenait une douzaine de bouteilles. La jeune femme en prit une et observa l’étiquette. Encore une fois, tout était écrit dans une langue qu’elle ne connaissait pas. En fait non, un mot lui était connu : VODKA. Réjouie par sa découverte, Beth’ s’assit puis ouvrit la bouteille. Elle la porta tout d’abord à son nez, respirant les vapeurs d’alcools qui lui montèrent rapidement à la tête. Si ses souvenirs étaient bons, elle n’avait pas bu une goutte d’alcool depuis son arrivée à Anguish. Ca lui avait un peu manqué au début, mais elle n’avait jamais été vraiment dépendante à quoi que ce soit à l’extérieur, elle consommait drogues et alcools à volonté à San Fransisco, et par chance n’avait pas eu plus de mal que ça de ne plus y avoir accès ici.

Beth’ porta ensuite le goulot à ses lèvres et but une gorgée. Aussitôt avalée, elle ne put s’empêcher de tousser pendant quelques secondes. Bon sang ce que c’était fort ! Dans ses souvenirs ça passait tout seul, comment c’était possible ?! Avait-elle perdu l’habitude ? La jeune fille s’intéressa à l’étiquette, pour connaître le degré alcoolique, par curiosité.

Soudain, Bethany sentit une présence derrière elle. Se retournant, elle vit alors une tête connue qu’elle n’avait pas croisée depuis une grosse semaine. Depuis combien de temps était-il là ? Elle lui sourit en guise de bonjour.

« Salut »

Leur dernier tête-à-tête avait était particulier, comme toutes leurs rencontres en fait…Et comme il l’avait prévu, elle y avait pas mal réfléchi depuis. Comme si de rien n’était, elle lui dit, sourire aux lèvres :

« Tu devineras jamais ce que je viens de trouver ! »

Pour accompagner ses paroles, elle lui montra la bouteille, fière de sa découverte.

Le surveillant sembla surpris quand elle lui parla de sa vie amoureuse chaotique. Oh c’est bon, y avait rien d’extraordinaire non plus ! Il dit alors espérer que c’était elle qui envoyait se faire voir les mecs, ce qui la fit sourire.

« Oui c’est moi. Faut croire que je suis pas faite pour être en couple. »

Beth’ détourna le regard, sans vouloir s’étendre encore plus sur le sujet. Elle prit quelques instants pour respirer l’air qui rafraîchissait son corps bien chaud avec l’alcool. En regardant de nouveau son compagnon de jeu, elle le vit hésitant. Décidément, c’était quoi son souci avec l’alcool ? Finalement, il porta la bouteille à ses lèvres et but une nouvelle gorgée, presque à contrecœur. Ainsi donc ses histoires sentimentales avaient duré plus longtemps que les siennes. C’était assez injuste en fin de compte, quand on savait que c’était un violeur, ce qui n’était pas censé plaire aux filles. Mais bref, encore une fois, elle ne devait pas être faite pour ça.

Heureusement, le surveillant changea radicalement de sujet. Il annonça de jamais avoir fait le tour du Kama-Sutra. Au tour de la jeune fille de le regarder avec des yeux ronds puis d’éclater de rire. Lui, avouant ne pas être si expérimenté que ça, c’était un comble ! Il semblait s’en vouloir un peu d’avoir annoncé ça comme ça. Il la regarda d’ailleurs avec un sourire railleur, lui promettant d’aller se jeter dans l’eau et de se raser la tête si elle buvait. Ca pouvait être drôle, malheureusement, elle ne pouvait pas non plus se vanter de connaître le Kama-Sutra sur le bout des doigts, donc pas de vodka pour le moment.

« Non plus, désolée. »

Elle le regarda, riant, et secoua la tête, avant d’annoncer, sans réfléchir :

« Je n’ai jamais eu d’orgasme… »

Ouh là…Est-ce qu’elle avait bien dit ça ? Pas vraiment son genre. L’alcool la rendait euphorique et c’était sorti tout seul. Mais dès que Beth’ finit sa phrase, elle se rendit compte de ce qu’elle venait de dire. Aie aie aie… Perdant rapidement son sourire, elle se leva brutalement et vacilla. Bon sang ce que ça tournait ! La pensionnaire se rattrapa de justesse à l’épaule de Kurtis. Une fois rééquilibrée, elle le regarda, troublée.

« C’est débile comme jeu… »

Finalement, elle se rassit aux côtés du jeune homme. Mieux valait la position assise si elle ne voulait pas tomber, avec tout cet alcool avalé. La bouteille était pourtant loin d’être finie et autrefois elle supportait bien la vodka. Bon, il fallait dire que ça faisait deux ans maintenant qu'elle n'y avait pas touché et qu’actuellement elle était à jeun, pas super mélange pour supporter l’alcool. Une fois le postérieur sur la terre ferme, elle jeta un regard sévère à Kurtis.

« Aucun commentaire : tu bois et tu te tais ! »

Elle prit la bouteille et la lui mit en mains propres. Elle se doutait bien de toutes les pensées perverses qui pourraient lui venir en tête mais au moins, elle lui interdisait de les dire à voix haute.

Bon sang, quel idiot ! Tout se passait bien, ils s’amusaient même, et il fallait qu’il gâche tout ! Il n’aurait jamais du dire ces quelques mots qui étaient loin d’être innocents. Pourquoi compliquait-il tout ? Ca exaspérait la jeune fille. Alors oui elle l’avait giflé. Ce n’était peut-être pas vraiment la meilleure réaction. Elle avait espéré que ça lui remette les idées en place, que ça le dessoûle un peu. Mais non, ça ne semblait pas suffisant. Kurtis sembla pourtant surpris, peut-être plus par les paroles de la pensionnaire que par la gifle. Il lança alors qu’elle était parano et qu’il ne ferait pas tout ça uniquement pour la mettre dans son lit.

Elle le fixa du regard un court instant. Il semblait sincère. Beth’ le regarda en fronçant les sourcils alors qu’il se levait et fit quelques pas vers l’eau. S’il ne mentait pas, c’était encore pire. Au fond, elle le savait qu’il ne mentait pas, mais elle aurait tellement préféré que ce soit encore une ruse de violeur. Elle qui n’avait jamais fait confiance aux hommes, elle avait du mal aujourd’hui à se rendre compte de ce que c’était. Surtout avec ce qu’il lui annonçait…

Une fois le surveillant éloigné, Bethany arriva peu à peu à se calmer et à reprendre ses esprits. Elle le regarda alors finir la bouteille. Ouh là, ça n’annonçait rien de bon ! Elle l’observa silencieusement. Que dire de plus de toutes façons ? Elle avait bien remarqué son problème avec l’alcool et à le voir, finir la bouteille n’était probablement pas la meilleure solution. D’ailleurs, il finit par s’asseoir, non loin d’elle. Pendant quelques secondes, aucun d’eux ne parla.

Si lui semblait bouder, elle refusait également de faire le premier pas pour reprendre une discussion. Elle lui en voulait. Le baiser avait déjà été une erreur, tout comme dire qu’il l’aimait. Le pire dans tout ça, c’était qu’elle n’y était pas insensible. Sa vie était déjà assez compliquée, mais depuis qu’elle avait rencontré Kurtis, et depuis ce baiser, tout était confus dans l’esprit de Bethany. Il n’aurait pas dû…
Elle regardait le jeune homme, là de dos. Finalement, elle serait la première à rompre le silence. Ahh l’impatience, quel sale défaut…

Se rapprochant à quatre pattes, préférant éviter de se relever et d’avoir la tête qui tourne, elle arriva aux côtés de Kurtis. Le regardant fixement, elle finit par dire

« Shean… »

Elle remarqua aussitôt que c’était la première fois qu’elle l’appelait par son prénom. Elle voulait juste l’interpeller pour qu’il relève la tête et c’était sorti tout seul. Déstabilisée, elle continua :

« Tu sais bien que c’est impossible »

Elle baissa les yeux. Elle semblait si douce à présent, ce qui était loin d’être la Beth’ de tous les jours. Pourtant, elle était sincère, même s’il lui était impensable d’avouer ce qui leur arrivait.

« Si ce que tu dis est vrai, on fait quoi maintenant ? »

Elle avait relevé ses yeux et soutenait maintenant le regard du surveillant, attendant une réponse honnête de sa part.