Jouons le jeu ! [Beth']

Shean n'avait aucune envie de se lever ce matin là. Lorsqu'un de ses collègues avait le malheur de le déranger avec indiscrétion, il grognait et enfonçait sa tête dans l'oreiller. Pas le moral ? Certainement. Ou tout simplement pas envie de se lever pour faire sa ronde de surveillant et de s'ennuyer à mourir une fois de plus. Sans compter le rêve étrange et débile qu'il venait de se farcir toute la nuit.
Il était dans un des couloirs d'Anguish en train de fumer une cigarette et soudain il entendait un rire féminin envahir l'espace. Et puis au bout d'un moment Keira apparaissait devant lui habillée en secrétaire et se moquait de lui avant de le frapper avec une batte de baseball. Alors il se retrouvait ensuite dans une boite de nuit de New York où il croisait Keiji en train de faire un striptease. Là Darren venait l'assommer par derrière avec une bouteille de champagne et pour terminer, il atterrissait dans un salon ou Diva entrait avec un biberon et soudain, une dizaine de gosses entraient en hurlant : Papaaaaaaaaaa !!
Et hop, il s'était réveillé en sursaut, tout en sueur, limite tremblant. Oh l'horreur ! Oh le cauchemar ! On comprend qu'il préfère se remettre de ses émotions au fond de son lit du coup.

Seulement voilà, aux alentours de 14h son ventre commençait à crier famine. Ce fut donc avec mauvaise volonté qu'il se leva et enfila un jean et une chemise noire. Il tenta également de discipliner ses cheveux devant un miroir puis abandonna et sortit du dortoir pour se diriger ver les cuisines. Ce n'était pas la peine d'empoisonner son estomac avec ce qu'il y avait au réfectoire maintenant qu'il était surveillant !
Il en profita pour piquer un paquet de cigarette à un pensionnaire imprudent et l'alluma en chemin. Ah voilà qui faisait du bien ! Un bonne clope ensuite un bon repas et tout irait mieux.
Dix gosses !
Arrrrgh c'était pas le moment d'y penser c'était qu'un cauchemar à la con rien de plus, pas besoin d'en faire un plat. En parlant de plat qu'allait-il manger de bon ? Shean fouilla un moment des les frigo et fini par dénicher du filet mignon avec une tomate farcie et des pommes de terre. Bon, ça irait très bien ça. Il fit réchauffer l'assiette au four et s'installa sur une surface de travail pour profiter de son menu improvisé. Une fois celui-ci terminé et une crème au chocolat finement dégusté, il quitta les cuisines et vit soudain passer... Bethany ! Ah ! Voilà qui allait illuminer sa journée !

Tout sourire, il lui emboita le pas à bonne distance pour qu'elle ne le remarque pas. Il la suivit un moment avant que la jeune femme ne rentre dans la salle de divertissement. Tien, ça faisait longtemps qu'il n'était pas venu dans cet endroit.
Il attendit deux ou trois minutes derrière la porte le temps de terminer sa deuxième cigarette puis écrasa le mégot sur le sol et poussa la porte. Rien n'avait trop changé ici... un peu moins de poussière seulement. Il aperçut la silhouette qui l'intéressait et s'approcha, main dans les poches, l'air narquois.

- Tien, tien, salut Bethany ! Ça fait un petit bout de temps... tu m'évite ? Toi c'est fou ce que tu m'a manqué ! Quelles nouvelles ?

Il s'installa sur le canapé et croisa les bras en attendant sa réponse. Et oui voilà qui le mettait de fort bonne humeur ! Finalement il avait bien fait de se lever n'est-ce pas ? Restait à savoir comment cette rencontre allait se dérouler. Les précédentes avaient été plutôt spéciales.

Bethany se réveilla plus tard que d’habitude ce jour là. Elle s’était couchée tard il fallait dire. La raison ? La veille, elle avait mené une petite séance de torture. Etonnant ? Oui. Non seulement c’était la première fois, mais en plus c’était sur l’un des pensionnaires dont elle était le plus proche, Darren Smith. Pourtant, si c’était à refaire elle le referait, après tout elle n’avait pas eu le choix à la base, c’était elle ou lui et là dessus, elle n’avait pas de remords. Mais en même temps, quelque chose la perturbait dans ce qui s’était passé dans la salle de torture, c’était cette sensation de puissance qu’elle avait ressentie et adorée. Depuis, elle ne pouvait pas s’empêcher de se poser des questions quant à ces émotions.
Elle se réveilla donc aux alentours du midi, alors que le dortoirs féminin était vide ou presque. La nuit n’avait pas été si difficile, elle s’était endormie plutôt facilement et ne s’était pas réveillée une seule fois. Une fois debout, elle se souvint qu’elle avait fait un cauchemar mais impossible de se rappeler ce qu’il s’y passait. Une unique pensée lui vint, ce qui s’était passé la veille. La jeune fille secoua la tête, elle ne voulait pas s’en souvenir, pas maintenant. Elle décida alors de filer dans la salle d’eau. Elle y prit une douche, en prenant soin de mettre sa serviette entre la caméra de surveillance et elle – depuis que Kurtis lui en avait parlé, Bethany avait pris l’habitude de ce geste de pudeur – et l’eau glacée lui permit d’évacuer un court moment toute pensée négative.

Alors qu’elle se retrouva enfin propre et habillée, la pensionnaire sortit de la pièce. Elle alla au réfectoire où elle prit son déjeuner, qui avait eu le temps de refroidir, mais ça n’avait pas vraiment d’importance. Bizarrement, il y avait bien plus de monde que d’habitude dans les couloirs et dans l’ensemble du pensionnat, ce qui était plutôt étrange, la plupart préférait éviter les ennuis, et donc la foule. C’était le cas de Bethany, qui décida de sortir un moment. Ce n’est qu’en ouvrant la grande porte du hall qui donnait sur l’extérieur qu’elle comprit pourquoi tout le monde était dans le bâtiment : dehors, une lourde et puissante pluie s’abattait sur le paysage, offrant par endroit de grosses flaques d’eau, accompagnée par de violentes bourrasques de vent frais. La jeune fille referma la porte, préférant de loin rester à l’intérieur, et fut parcourue de frissons face au courant d’air glacé qu’elle avait provoqué quelques secondes. Quel temps de chien ! Beth’ croisa les bras pour tenter de se réchauffer, puis prit les escaliers, en réfléchissant à un endroit tranquille qui pourrait l’accueillir.

Elle arriva ainsi au deuxième étage, avec l’idée du salon de divertissement en tête. « Divertissement »…qu’est-ce qu’ils n’allaient pas inventer. Un canapé à moitié défoncé, de même pour les quelques fauteuils, et un baby-foot qui tenait à peine sur trois pieds et qui représentait probablement la première cause de chopper le tétanos à Anguish. Bethany entra dans la pièce. Il y avait déjà cinq ou six personnes, chacun dans son coin, deux discutaient à voix basse, plusieurs lisaient des livres, et un s’était assoupi sur un fauteuil. Tous – à l’exception du dormeur - levèrent la tête à l’arrivée de Beth’ puis retournèrent à leurs occupations, rassurés de ne voir en elle aucune menace. A les voir, on aurait même pu se croire dans un endroit sûr, grossière erreur, bien entendu…

La jeune femme se dirigea tranquillement vers une fenêtre et observa le chaos météorologique au dehors. Et là, tous les évènements de la veille lui revinrent en mémoire, comme un coup de poing en pleine figure. Elle avait pris du plaisir à frapper Darren, à se sentir si forte, si puissante. Et à présent ça la terrifiait. Devenait-elle comme tous ces bourreaux qu’elle haïssait ? Etait-ce une conséquence de ses deux années passées à Anguish, ou bien était-elle déjà destinée à ces gestes barbares bien avant son arrivée ici ? Autant de questions qu’elle se posait depuis son réveil, et qui lui sautèrent en plein visage alors qu’elle regardait son faible reflet dans la vitre. Tellement concentrée dans ses pensées qu’elle n’entendit pas la porte s’ouvrir et qu’elle ne remarqua pas que le salon se vidait rapidement – hormis le pensionnaire du fauteuil, toujours en plein sommeil – alors qu’un surveillant faisait son entrée. Ce n’est que quand il prononça quelques mots qu’elle sortit de sa réflexion. Elle n’eut même pas besoin de se retourner, c’était maintenant une voix familière. Kurtis.

Elle ne put s’empêcher d’afficher un faible sourire. Il arrivait toujours quand elle ne s’y attendait pas. Leurs rencontres étaient à chaque fois particulières et uniques. Et même si elle avait toutes les raisons de le détester – de par son poste de surveillant mais aussi et surtout le fait qu’il voulait violer toutes les filles du pensionnat, ce qu’il avait déjà tenté déjà deux fois avec Bethany – et qu’il représentait tout ce que la jeune fille détestait, il y avait quelque chose qui, par moments, lui donnait envie de rester en sa compagnie, un quelque chose que la pensionnaire n’arrivait pas à nommer. N’allez surtout pas parler d’attirance, Bethany était persuadée que ce n’était pas ça, elle le détestait tellement par instants. Et bien sûr, il était hors de question de le dire un jour à l’intéressé.
Bref, le fait est que Beth’ n’était pas si mécontente que ça d’entendre la voix de Kurtis. C’est vrai que leur dernière rencontre datait, mais impossible de dire de combien de temps exactement.

« Je t’évitais pas. Toi par contre je vais finir par croire que tu me suis.»

Bethany se retourna enfin vers lui alors qu’il s’installait sur le canapé. La première chose qu’elle vit fut son fameux sourire narquois, celui qui lui avait tellement tapé sur les nerfs les fois précédentes. En prenant un air détaché, elle s’approcha de lui, observant au passage qu’ils n’étaient plus que trois dans la pièce, si on comptait le dormeur.

« Pas grand chose de nouveau ni de bien intéressant. Et toi ? »

Du coin de l'œil, Shean avait suivit le mouvement de désertion de la salle. Un par un ou par petit groupe, les quelques pensionnaires présents dans la salle s'éclipsèrent discrètement à son arrivée. Les filles furent les premières, ce qui ne l'étonna pas en fin de compte. Non en fait il se rendait simplement compte qu'il faisait davantage peur qu'il ne le pensait. Cool ! Faut dire qu'il n'avait jamais été tendre avec ces gens là. Soit il les tuait, soit il les torturait, soit il les violait. Dramatique n'est-ce pas ? Enfin ça dépend pour qui ! Bref, le bel homme ne s'était quand même pas attendu à un accueil si froid. C'est pas comme si c'était son genre de virer tout le monde ! Il parvenait encore à partager son oxygène quand-même, n'abusons pas ! Mais si ces imbéciles préféraient décamper, pas de soucis ! Il respirerait mieux et ce serait bien plus calme. Hum... en plus la seule personne qui l'intéressait ici c'était Bethany, la jolie pensionnaire a qui, malheureusement, il avait fait le promesse de ne plus la toucher. Enfin tripoter. Toucher il avait encore le droit ! Bonne nouvelle mais ça ne l'avançait pas beaucoup. Au fait c'était quoi son but avec cette fille maintenant ? Il pouvait plus la violer... et la tuer serait un grand gâchis. S'en faire une amie ? Bouah !! Aucun d'eux n'en avait l'envie ! Et puis l'amitié c'est du n'importe quoi, ça rime à rien. Disons... un petit lien amicale. C'était déjà pas mal non ? Mais pourquoi avoir promis un truc aussi débile sérieux ?! Allo les gens, cherchez bien, Shean à perdu son cerveau quelque part ! Si vous le trouvez soyez sympa de lui ramener, déjà qu'il s'en sert pas beaucoup alors si en plus il a le crâne vide je vous dit pas ! Il ne penserait plus qu'avec ses... ah en fait c'est déjà un peu le cas. Bref.

Bethany... Johns ! En fait il la connaissait pas vraiment, il paraitrait qu'elle ai un frère, elle n'aime pas franchement les hommes et étranglerait bien tous les violeurs. Bon. Ah oui et... c'est une petite rebelle dans l'âme, le genre de chaton qui montre souvent les griffes mais parait si adorable ! Elle est jolie, ses formes n'ont rien de bandant ni d'écœurant non plus, disons... 7/10 sur l'échelle de Kurtis (oui parce que y en a une !). Taille moyenne, yeux expressifs, sourire... rare mais joli... décidée, sûre d'elle, limite ambitieuse, prudente, indépendante, sincère...
Finalement il la connaissait peut-être trop. Mmh. Il fit la moue et cessa ici son analyse pour reprendre un peu ses esprits. En effet, elle venait de se retourner vers lui et... lui souriait ! Waow. Attends Shean depuis quand une fille ne t'as pas réellement sourit ? Pas un sourire hypocrite, charmeur ou amusé non, un vrai petit sourire qui ne veut pas dire grand chose, mais qui est tout de même là ! Hein ? Depuis quand ? Des mois... des années... une vie ? Une vie. Ou bien il n'avait pas su lire les autres. Peu importe !

La jeune femme répliqua enfin qu'elle ne l'évitait pas mais commençait à croire qu'il la suivait. La suivre ? Shean arqua un sourcil puis ricana. Pour une fois non ! Enfin si quand il l'avait vu passer dans les couloirs d'accord, mais globalement il ne la suivait pas partout comme avant lorsque son seul but était de la violer. Au contraire il la laissait plutôt tranquille. Peut-être qu'en fait ça lui plaisait de croire qu'il la suivait. Ou pas. Shean haussa les épaules et répondit :

- Je ne te suis pas du tout, je te promet ! Je n'y peu rien si mon destin me mène sans cesse jusqu'à toi. C'est peut-être un signe.

Il ricana. Bah tien ! Il ne croyait ni au destin ni aux signes le guignol ! Mais Bethany n'était sans doute pas assez naïve pour croire ces imbécilités. Pas besoin de s'appeler Einstein pour comprendre qu'il plaisantait.
Mais quoi de neuf dans la petite vie tranquille de cette jolie pensionnaire à Anguish ? D'après elle pas grand chose, rien d'exceptionnel en tous cas. Peu étonnant d'ailleurs.
Elle lui retourna alors la question. Le violeur fit une moue de réflexion, avachit dans le fauteuil et s'apprêta à répondre lorsqu'il surprit le regard long et pesant d'un type à l'autre bout de la pièce. Il fronça les sourcils.

- Quoi ?! Qu'est-ce que t'as microbe, tu veux ma photo peut-être ?

Le type en question haussa les épaules et détourna les yeux sur un vieux bouquin qu'il tenait entre les mains. Pff... il avait rien de mieux à faire que d'écouter les conversations qui le concernaient pas ? Bon revenons à nos moutons. A la jolie brebis en l'occurrence. Il se tourna donc de nouveau vers Bethany et lui répondit :

- On disait ? Ah oui... oh moi rien d'intéressant non plus, la routine quoi. Un égorgement par-ci, un viol par-là, une baffe d'un coté, une torture de l'autre... Boulot, Clopes, Dodo en résumé.

Rien d'excitant. L'envie de neuf se faisait toujours un peu ressentir. Il sourit et fit un signe à la jeune femme pour l'inviter à s'assoir également. Il allait pas la manger après tout... il avait promis. Bon on sait tous que les promesses chez Shean, ça n'existe pas. Il ne les tient jamais. Mais là bizarrement il s'y tenait. Ce qui ne lui retirait pas l'envie de découvrir son corps plus intimement... bien au contraire. Et ce n'était d'ailleurs pas compliqué de le deviner, il ne s'en cachait pas en la dévorant d'un regard gourmand.

« Pas grand chose de nouveau ni de bien intéressant » Si Bethany avait toujours été nulle en matière de mensonge, il fallait avouer qu’elle était plutôt douée pour passer sous silence ce dont elle ne voulait pas parler. L’habitude probablement, et à force la dissimulation était devenue partie intégrante de sa personnalité. Aujourd’hui, c’était le sujet ‘Torture de Darren’ qu’elle voulait éclipser. Et elle se débrouillait assez bien. D’ailleurs la présence de Kurtis lui permit d’oublier un instant ce qui s’était passé la veille. Il lui jura qu’il ne la suivait pas. Avant d’ajouter que ça devait être à cause du destin qu’ils se croisaient sans arrêt. Beth’ leva les yeux au ciel. Le destin, et puis quoi encore, ça faisait depuis longtemps qu’elle n’y croyait plus. Elle sourit tout de même au trait d’humour.

Elle le regarda tout en s’approchant de lui. Il semblait réfléchir à la question qu’elle lui avait retournée, puis soudain, d’une voix énervée, il interpella quelqu’un derrière elle. Beth’ se retourna et vit le ‘microbe’ en question. Lui ne semblait pas bien effrayé, pas comme tous les autres qui avaient fui la pièce. D'ailleurs, ils étaient pitoyables à se rabaisser ainsi ceux-là. Kurtis n’était pas si dangereux que ça. Après tout, elle était toujours vivante, il ne l’avait pas touchée, mis à part quelques coups et menaces enfin bref, c'était du passé semblait-il, et ce n'était rien de bien méchant par rapport à ce que les rumeurs disaient.

La pensionnaire revint alors au surveillant, amusée de sa réaction qui aurait pu être la sienne à vrai dire. Mais quand il répondit enfin à sa question, le sourire de la jeune fille se figea. Pour une fois qu’elle souriait, il fallait qu’il gâche tout en abordant le sujet qui fâche. Il devait savoir depuis le temps qu’elle était la première à désapprouver ses mauvaises habitudes qu’il appelait ‘routine’. Mais Bethany préféra ignorer ces paroles, et s’assit tout de même sur le canapé, sur l’invitation de Kurtis, tout en secouant simplement la tête. Et là, alors qu’elle relevait la tête vers le surveillant, elle vit son regard de vicelard. Aussitôt elle se leva et le pointa de l’index.

« Arrête ça tout de suite ! »

Sans même qu’il puisse répliquer, elle ajouta :

« Ça là, ce regard pervers ! »

La pensionnaire le regarda une seconde ou deux, l’air dur. Il lui avait pourtant promis qu’il arrêterait. Puis elle se rassit, en soupirant. C’était quoi son problème à la fin ?!

« Je peux te poser une question ? »

Bien entendu, elle se fichait qu’elle en ait l’autorisation ou non. Elle n’attendit donc pas et continua dans sa lancée, le fixant toujours des yeux.

« Qu’est-ce qui t’est arrivé pour que tu sois comme ça ? Je veux dire…avant Anguish, car à ce que j’ai compris tu étais déjà comme ça avant »

Elle était sincère, sincère et perdue aussi. Elle avait besoin de savoir au fond. Elle n’arrivait pas à chasser de son esprit l’épisode de la veille. Allait-elle devenir comme Kurtis, était-elle programmée à devenir comme tous ces psychopathes ou bien y avait-il une chance qu’elle reste un minimum normale ? Elle voulait juste une réponse, et peut-être que le surveillant allait l’aider à l’obtenir.

Shean était tout simplement en train de la regarder, ravi qu'elle finisse par s'installer à ses cotés. Mais soudain, alors qu'elle croisait son regard, elle bondit sur ses pieds en lui hurlant a moitié dessus. Le violeur fit mine de se protéger avec ses bras et prit un air d'incompréhension. Ola ! Qu'est-ce qui se passait tout à coup ? Il avait pourtant rien fait de mal si ? Il avait beau chercher rapidement là... rien de grave ne lui venait par la tête. Il fit alors la moue et lâcha sans comprendre :

- Arrêtez quoi ? Qu'est-ce que j'ai fait ?!

Non vraiment là pour une fois il donnait sa langue au chat ! Il comprit alors qu'elle lui reprochait son regard. Son regard ? Bah quoi ?! Oh elle allait pas chipoter pour ça aussi non ? Un regard de rien du tout ! S'il pouvait même pas regarder les filles alors qu'est-ce qu'il pouvait bien faire d'autre ? Papoter ? C'était pas trop son truc de faire que ça. Non franchement fallait pas exagérer et faire tout un plat d'un regard ! Il soupira et fronça les sourcils en répliquant :

- Et oh j'ai promis que je te violerai pas ! Mais l'interdiction de te bouffer des yeux c'était pas dans le contrat ok ?

Bah oui quand même ? Il la touchait même pas, y avait pas de quoi se plaindre. Déjà lui interdire de violer c'était limite mais lui interdire de dévorer une nana du regard c'était un peu fort ! On pouvait pas lui demander de devenir un gentleman du jour au lendemain ! C'était plus de l'espoir à ce niveau là mais de l'utopie !
La jeune femme fini tout de même par se rassoir. Elle avait une question pour lui. Ola... ça cachait quoi encore tout ça ? Le jeune homme arqua un sourcil et tendit l'oreille. Elle voulait savoir ce qu'il avait vécu pour être ce qu'il était : un violeur. Ah la voilà la bonne question ! C'est sûr, si on veut comprendre une personne sans mal le juger il faut connaître ce qu'il a vécu ! Oui mais est-ce que Shean allait répondre ? En général parler de ça il évitait ! Mais ma demoiselle semblait vraiment vouloir écouter ce qu'il avait à dire. Le jeune homme s'installa confortablement, ramenant ses jambes contre son torse et renversant sa tête pour la caler contre ses bras croisé derrière la nuque et posé sur le dossier du fauteuil.

- Bon, je vais te répondre.

Oui mais est-ce qu'il lui sortait l'histoire en résumé toute banale et sans intérêt où tous les petits détails déprimants et croustillants ? Bon allons-y pour les détails sinon elle ne comprendra rien. Il se lança donc, le regard tourné vers le plafond :

- Il était une fois un mec qui s'appelait Christopher Moon. C'était un bon avocat qui vivait seul dans un studio, célibataire endurcit et qui s'occupait pas mal de sa vieille mère. Au bureau il travaillait avec la magnifique Elizabeth Collins dont il était secrètement fou amoureux. Seulement y avait un hic : elle était fiancée à James Kurtis. Le pire, c'est que le couple et l'avocat étaient les meilleurs amis du monde. Gros dilemme pour l'amoureux transit. Le couple se maria, inondé de bonheur et Christopher était de plus en plus raide dingue d'Elizabeth. Un soir ils travaillèrent un peu plus tard au bureau. Ce jour là elle avait du sortir la tenue sexy de la parfaite petite secrétaire, en tous les cas, l'avocat ne put se retenir et la viola. Au moment même ou il entamait son acte, il le regretta fortement. Et lorsque la jeune mariée s'enfuie, il tomba dans un profonde dépression nerveuse. James et sa femme coupèrent tout lien avec leur ami et décidèrent d'aller s'installer dans une île au milieu de l'océan, ne gardant contact qu'avec la mère de l'avocat qu'ils aimaient beaucoup pour sa générosité. Ils lui envoyaient beaucoup de lettre pour donner de leur nouvelle, ce que Christopher ignora tout du long.

D'un air distrait, il dégagea une main pour grattouiller sa barbe naissante puis la remis à sa place avant de continuer :

- James et Elizabeth Kurtis avaient la seule maison de toute l'île et en étaient d'ailleurs les seuls habitants. Un jour la jeune femme apprit qu'elle était enceinte. Chose étrange car Jales ne pouvait pas concevoir d'enfants ! Ils comprirent alors sans mal que ce gosse était celui de Christopher. Comme ils ne pouvaient pas faire autrement que le garde, Elizabeth donna naissance à un enfant qu'il détestèrent dès la première seconde, un petit garçon adorable : moi.

Il eut un rire amusé. Adorable certes mais ça faisait bizarre de reparler de ça. Il s'en serait bien passé de sa naissance tien ! Enfin bon maintenant c'était fait. Il s'éclaircit la gorge et ajouta :

- Ce gosse ne fut jamais aimé. Jamais. Pas de câlins, pas de douceur, pas de baisers, pas de mots gentils, pas de caresses, pas de ballades en famille, pas de jeu, pas d'amour tout simplement. Que de la haine. Lui il trouvait ça normal, après tout il n'avait rien pour comparer. Et puis à l'âge de quatre ans, Elizabeth accouché miraculeusement après tant d'essais et de prière d'une petite fille. Ce fut le grand évènement ! C'est là que le gamin commença à souffrir. Ce bébé avait tout. Des câlins, des chansons, des sourires, des baisers, des jouets, des rire, des mots tendres. A partir de ce moment là il creva de jalousie. Il toucha jamais à sa petite sœur, il était bien trop petit et innocent pour ça. Sa jalousie et sa colère restèrent toujours muette. Toujours. Il cachait tout ça au fond de son petit cœur meurtrit.

C'était lui ça ? Lui-même s'en étonnait. C'était si différent du Shean d'aujourd'hui ce petit enfant blessé et malheureux, incapable de faire du mal à une petite mouche. Il enchaina :

- A neuf ans, le gosse surpris une dispute entre ses parents. James reprochait à sa femme de recevoir des lettres d'un homme dont Shean ignorait l'existence. Son prénom revint pourtant dans la conversation, ce qui suffit à aiguiser sa curiosité. Le champ libre, il fouilla la chambre et trouva un paquet de lettre qu'il alla lire en secret sous sa couverture. Il mit beaucoup de temps à décrypter et à comprendre le tout puisque ses parents avait peu daigné lui enseigner la lecture. Mais il comprit l'essentiel : James n'était pas son père et c'était pour ça qu'on ne l'aimait pas. Dans ses lettres, l'homme suppliait Elizabeth de lui parler de son fils dont il avait apprit l'existence par sa mère. Il voulait voir son fils Shean. Il voulait avoir au moins une photo de lui et s'excusait un millier de fois d'une erreur qu'il avait commise dans le passé. Pour la première fois de sa vie, à travers de l'encre et du papier, le gosse se sentit aimé.

Shean avala sa salive sans quitter le plafond des yeux. Il semblait immergé dans ses souvenirs à la fois bon et douloureux. Ça datait pas d'hier mais il se souvenait de tout... des moindres détails. Il continua donc enfin :

- Il s'enfuie de la maison pour partir vivre tout seul. Il se construit une cabane et se nourrit de chasse, de fruits, et de la nourriture qu'il volait dans la réserve de ses parents. Ceux-ci ne cherchèrent jamais à le retrouver, bien trop préoccupés par la petite Alicya. Il vécu ainsi jusqu'à 17 ans. Et puis un matin il se dirigea vers la remise de son père, chargea une carabine et entra dans la maison en brisant la porte. Là, il les tua tous un par un. Son père, sa mère, et sa petite sœur de 13 ans. Avec un radio il appela les flics et fit passer le tout par une attaque de pirates. Alors il débarqua à New York et là sa vie changea du tout au tout. Drogue, tabac, alcool, trafic, vols, meurtres, sexe, viols, boites de nuit, débauche totale. Parmi tout ça, il a cherché longuement ce dont il avait toujours été dépossédé : de l'amour. Il ne le trouva qu'ici, à Anguish où il fut envoyé deux ans plus tard. Avec Léonie. Mais lorsqu'il découvrit ce sentiment... il en eut peur. Il se sentait tellement mal à l'aise dans ce sentiment étrange et si différent qu'il préféra le fuir. Mais quand on le connait une fois ça vous colle à la peau. Il y a eu Léonie, Diva, Arella... et Keira. Fin de l'histoire.

Shean ferma un instant les yeux et soupira en s'installant de manière plus naturelle sur le canapé, fixant le sol cette fois-ci. Et voilà, c'était ça son histoire. Un peu pourrit, un peu triste et un peu pitoyable aussi. Est-ce que ça justifiait et expliquait ce qu'il était devenu ? En partie sûrement.Ou peut-être pas du tout. Même lui ignorait la réponse.
Il avait raconté tout ça à la troisième personne volontaire, ça paraissait plus facile.
Et Bethany dans tout ça ne devait pas avoir une meilleure vision de lui bien au contraire. Et il y avait de quoi.

Contre toute attente, Kurtis répondit à sa question. Mieux : il rentra même dans les détails, la jeune fille n’en demandait pas tant. Elle le vit s’installer confortablement dans le fauteuil et commencer à raconter son histoire, fixant le plafond des yeux. Sans le lâcher du regard, elle l’écouta attentivement. Pendant les premières secondes, elle ne put s’empêcher de s’imaginer devant ces soaps ridicules que sa mère regardait à la télé tous les mercredis. Mais non, rien à voir. Sans réagir, elle suivait avec intérêt l’histoire du surveillant.

Quand il eut enfin fini son monologue, Bethany baissa un peu la tête. Elle voulait savoir ce qui était arrivé à Kurtis pour devenir ce mec détestable qu’elle avait rencontré quelques mois auparavant, c’était chose faite. Mais étrangement, elle comprenait. Il avait eu beau tout raconter comme s’il n’était pas concerné, avec calme et aucun semblant de remords, même pour les passages les plus sordides. Il avait parlé du viol de sa mère, des meurtres de sa propre famille et de ses agissements malsains à New-York sans broncher. Mais la jeune Beth’ comprenait. Elle n’éprouvait ni pitié, ni dégoût. Juste de la compréhension. Ca ne pardonnait en rien toutes les horreurs qu’il avait faites, mais ça expliquait pourquoi. Elle avait la réponse à sa question. Kurtis n’avait pas eu de bol, il était tombé sur la mauvaise famille, une famille qui avait refusé de le considérer comme en faisant partie, de le renier lui et son père biologique. Mais il n’y avait été pour rien. Et les circonstances l’avaient rendu comme il était à présent. A sa place, Bethany ne savait pas ce qui se serait passé, peut-être que la situation aurait été tout autre, ou bien aurait-elle agi de même, impossible de le savoir…
La vie était décidément faite de malchance, sur ce point le surveillant et la pensionnaire avaient un point commun, même si Beth’ n’aimait pas cette idée. Elle releva la tête vers le jeune homme. Bizarrement, en sachant maintenant son histoire, elle le voyait différemment. C’était plus facile de le détester sans trop le connaître. Regrettait-elle de l’avoir questionné sur son passé ? Peut-être un peu, même si sa curiosité avait été satisfaite.

Regard dans le vide, elle ouvrit enfin la bouche, sans trop savoir quoi dire.

« En fait, tu n’as pas eu de chance, c’est tout. Tu es tombé sur la mauvaise famille. »

Elle lui sourit, tristement. Elle était reconnaissante qu’il lui ait raconté tout ça. Ils étaient pourtant loin d’être les meilleurs amis du monde. Lui violeur et elle… Peut-être devait-elle parler d’elle à son tour, se dévoiler comme il l’avait fait. Mais non, elle en serait incapable. Et puis à tous les coups il s’en fichait éperdument, ou alors ce qu’il avait lu dans son dossier lui suffisait.

En fait du début jusqu'à la fin, Shean avait toujours été détesté, craint et hait par tout le monde alors pourquoi ça changerait ici ? Il avait l'habitude qu'on le rejette et qu'on le déteste et il ne s'en plaignait pas franchement.Bon le rejeter d'une raison purement sexuelle ça en revanche ça l'énervait et il trouvait ça injuste. Il était beau gosse après tout et était maître dans l'art du rapport sexuel ! Mais comme toutes ces pauvres filles refusaient de l'admettre il fallait bien qu'il leur prouve un jour ou l'autre ! Seulement un viol ça n'a rien de jouissif pour une victime donc au bout du compte ça ne servait à rien ! Elles rataient quelques chose ces tête de mule ! Bethany aussi évidemment puisqu'elle faisait partie de celles-là !
Enfin... voilà son histoire en long et en travers. Beth' avait voulu l'entendre et bien c'était chose faîte ! Que pensait-elle désormais ? Est-ce qu'elle le détestait encore davantage, est-ce qu'elle le plaignait, est-ce qu'elle était compréhensive ? Shean se fichait bien de le savoir en fait puisque ça ne changerait pas grand chose pour lui. Remarquez... si elle finissait par se prendre d'affection pour lui il ne dirait pas non !
Elle resta plutôt silencieuse en fait, la tête basse. Bon la bonne nouvelle c'est qu'il ne la dégoutait pas davantage. C'était déjà ça. Elle semblait juste réaliser et comprendre pourquoi Shean agissait ainsi à longueur de temps. Pourquoi il se vantait, pourquoi il sautait sur tout ce qui bouge, pourquoi il était arrogant et impitoyable. Voilà donc elle savait tout.

Au bout d'un moment elle finit par ouvrir la bouche et annoncer qu'il n'avait simplement pas eut de chance et était tombé sur la mauvaise famille. Shean haussa les épaules et lui lança un regard avec un sourire en coin pour répliquer :

- Mouais si on veut.

Tu parles d'une "famille". La seule chose qu'il leur devait c'était de l'avoir maintenu en vie en lui donnant de quoi manger et dormir. Le reste... rien du tout ! De toute manière aujourd'hui ils étaient tous morts.
Il continua d'observer Bethany en silence puis se pencha légèrement sur elle pour redresser son menton du bout du doigt. Il sourit sincèrement et demanda :

- Toi non plus t'as pas eu de chance hein ? Personne ici n'en a eu, sinon on serait tous dehors. On s'en fiche du pourquoi et du comment au fond... tout ce qui importe c'est le résultat. Et faut avouer qu'il est pas joli joli.

La proximité qu'il y avait entre eux le troubla un instant. Pourtant c'était pas une chose qui le troublait en général au contraire. Quelque chose de chaud semblait remplir sa poitrine et c'est réellement sans s'en apercevoir qu'il s'approcha encore d'avantage, comme aimanté vers elle, pour l'embrasser. Ça n'avait rien du baiser sauvage et fougueux qu'il avait l'habitude de donner aux filles. Le genre de baiser qui donne pas le choix, qui soumet impitoyablement. Non là c'était un simple effleurement des lèvres... un baiser tendre et chaud qui le surpris lui-même.
Heu Shean... tu fais quoi là ?!

Bethany regardait le sol, semblant trouver un intérêt particulier par la vieille moquette qui revêtait le sol. Elle repensait à tout ce que le surveillant venait de lui raconter. Elle en oubliait même presque tous les sales coups qu’il avait tenté de lui faire. Les tentatives de viol, les chantages et même les coups qu’il lui avait assenés la dernière fois, quand elle l’avait provoqué. Tout cela semblait si loin. Elle se sentait maintenant un peu plus proche de lui. Ce n’était peut-être pas une grande amitié qui les unissait, mais elle se sentait plus proche.

La jeune fille sentit alors les doigts du jeune homme sur son menton qui relevèrent son visage. Elle le laissa faire, et hocha tristement la tête à ses paroles. Pendant une fraction de secondes, elle pensa à le mettre au courant du plan d’évasion. A Anguish, ceux qui torturaient semblaient vouloir rester ici, dans cet endroit qui leur offraient de parfaites victimes. Ce n’était pas le cas de Kurtis, il semblait regretter autant qu’elle la vraie vie, l’extérieur. Mais elle se ravisa rapidement, ce n’était pas le moment d’aborder le sujet.

Pendant un instant, ils ne parlèrent plus. Leurs regards se croisèrent et ils restèrent là, dans un calme particulier. Bethany était curieusement troublée par cette situation. Puis elle le vit s’approcher d’elle, de son visage. Bizarrement, elle ne comprit pas tout de suite et mit quelques secondes pour se rendre compte de ce qu’il faisait. Quand leurs lèvres s’effleurèrent, elle ne chercha pas à fuir. La pensionnaire sentait son cœur s’accélérer, toutes ses pensées s’envolèrent un instant. La bouche et le baiser du surveillant étaient d’une douceur qu’elle n’avait jamais connue. Elle pouvait sentir l’odeur masculine du jeune homme, une odeur loin d’être désagréable. Soudain elle se reprit. Qu’est-ce qu’il leur arrivait ? Non, il ne fallait pas !

Beth’ s’écarta subitement des lèvres de Kurtis, accompagnant sa réaction en le repoussant d’une main.

« Non… »

Elle le regarda, surprise.

« Non ! » répéta-t-elle, abasourdie.

En fronça les sourcils et secoua la tête, reprenant peu à peu ses esprits. Qu’est-ce qu’il lui prenait encore ?! Non, c’était pas bien. Il ne fallait pas. Si c’était encore un de ses moyens de pervers pour l’attirer dans ses filets, elle finirait par en avoir plus que marre !

« On avait un accord Kurtis ! Je…Non ! C’est quoi ton problème bordel ?! »

Elle le regarda énervée sans vraiment l’être. Son baiser l’avait troublé plus qu’exaspérée. Ce n’était pourtant pas la première fois qu’elle recevait un baiser mais celui-ci avait été différent de tous les autres. Peut-être que c’était parce que ça datait. Oui, c’était forcément ça. Beth’ se mordilla la joue intérieure, nerveuse. Elle ne voulait plus y penser, l’effacer de sa mémoire. Se levant, elle voulait juste se faire la plus petite et partir le plus vite possible. Elle repensa alors qu’ils n’étaient pas seuls dans la salle. Balayant la pièce du regard, elle remarqua que tous les yeux étaient braqués sur eux, ce qui mit la jeune femme encore plus mal à l’aise pendant une courte seconde, avant de leur jeter un regard furieux pour qu’ils reprennent leurs occupations.

Il fallait l'avouer, même Shean ne comprenait pas et ne réalisait pas vraiment ce qu'il faisait. Le geste avait été automatique, totalement irréfléchi, juste... naturel. Il avait juste ressentit cette envie de sentir ses lèvres sur les siennes. De réellement les sentir, pas simplement de les posséder violemment comme il le faisait en général. D'ailleurs ce fut surprenant. A ce contact, il se sentit un peu transporté dans son élan, désirant l'embrasser encore, sentir de nouveau la chaleur de ses lèvres contre le siennes. Ça n'avait plus rien de... sexuel. Il leva lentement une main, désirant glisser ses doigt sur la joue et dans les cheveux de la jeune femme mais l'espèce de magie qui l'entourait se brisa lorsque Bethany le repoussa. Il fut simplement surpris que la sensation se brise plus que de son geste. Il fallait s'y attendre... la jeune femme ne supportait pas ce genre de chose... un simple le regard la mettait hors d'elle alors un baiser ! Il avait pourtant cru durant un seconde qu'elle se laisserait faire. Après tout elle n'avait pas réagit immédiatement, il avait sentit son souffle se suspendre... bien dommage que son esprit soit revenu trop vite à la charge !
Elle refusait de se laisser faire, le repoussant donc et se leva, irritée, se demandant quel était son problème. Shean fronça légèrement les sourcils et baissa les yeux, regardant ailleurs. Oh il n'avait pas honte... il était juste déçu. Et agacé. Agacé pas seulement du comportement de Bethany mais de ce qu'il avait put ressentir un instant. Tu vas où là, Shean ?! On croyait que c'était fini ça tout les deux ? Rrrrah je vous jure !

Le violeur s'aperçut lui aussi que les deux ou trois pensionnaires qui étaient resté dans la salle les observait avec étonnement. C'est sûr que la scène pouvait paraitre étrange. Shean se releva brutalement et hurla :

- Barrez-vous !!

Au ton de sa voix et à la mine énervée du surveillant, deux des pensionnaires s'empressèrent d'obéir sans demander leur reste. Quand au dernier... le fameux type qui l'avait fixé tout à l'heure, il se contenta déchausser un sourcil. Shean serra les poings et s'approcha de lui.

- T'as entendu, conn*rd ?! J'ai dis barre-toi !

Le gamin se leva et parut un instant vouloir le défier, le fixant droit dans les yeux. Ils se défièrent longtemps du regard, mais ce fut le surveillant qui l'emporta. Le pensionnaire finit par sortir à son tour, claquant brutalement la porte derrière lui. Sale gosse. Bon où est-ce qu'il en était déjà ? Ah oui !
Le jeune homme se retourna vers Bethany qu'il regarda un instant sans rien dire. Puis il lança :

- Un accord ? De quoi ? De ne pas te violer c'est ça ? J'ai pas eut l'impression d'avoir tenté quoi que ce soit.

Il s'avança, le visage neutre mais un peu fermé. Il lui fit face, plongeant ses yeux dans le siens, puis posa un doigt sur son front simplement avant de murmurer avec grand sérieux :

- Quand tu auras mit un peu d'ordre là-dedans fais-moi signe. J'attendrais...

Sur ce, il lui tourna le dos et se dirigea vers la sortie. Qu'est-ce que ça voulait dire au juste ? Il attendait quoi ? Tout simplement qu'elle sache ce qu'elle voulait...
Shean savait très bien ce qui s'était passé et pourquoi il l'avait embrassé. Quelques jours plus tôt il en aurait fait une crise de rage terrible. Il s'était promit : plus jamais ! Mais là il devait l'admettre... ça recommençait.

Bethany évitait de regarder le surveillant. Ce qui venait de se passer la gênait un peu. Alors qu’il remarqua à son tour qu’ils étaient épiés par les pensionnaires de la pièce et qu’il leur hurla dessus, elle releva la tête vers lui. Les individus préférèrent s’en aller…sauf un qui décida de lui tenir tête. La jeune femme regarda les deux un par un. Kurtis semblait assez énervé pour le frapper. En arriveraient-ils aux mains ? L’autre pensionnaire le méritait un peu après tout. Mais non, heureusement après des échanges de regards qui faisaient penser à un western, le pensionnaire quitta la pièce. Beth’ lâcha un petit soupir et regarda le surveillant dans les yeux alors qu’il se ré-interessa à elle. C’est vrai qu’il n’avait pas essayé de la violer cette fois. Mais une part d’elle se disait que ce baiser n’était peut-être qu’une nouvelle tentative pour l’inciter à coucher avec lui. Pourquoi l’aurait-il embrassée sinon ? Du moins, elle préférait cette explication au fond. Bon sang. C’était beaucoup trop compliqué tout à coup.

Elle le laissa se rapprocher d’elle. Son air était bien plus dur, comme s’il avait mal pris sa réaction. En fait oui, il l’avait mal prise, elle le savait. Il posa un doigt sur son front, lui demandant de bien réfléchir. Et qu’il ‘attendrait’… ‘Attendrait’ ? Attendre quoi ? Beth’ fronça les sourcils. Ca voulait dire quoi ça, qu’est-ce qu’elle devait comprendre ?

Alors qu’il lui tournait le dos et s’approchait de la porte, la jeune femme ouvrit la bouche, pour le lui demander. Puis elle se ravisa, et la referma. Elle le regarda quitter la salle de divertissement, sans un bruit. Fermant les yeux un court instant, elle les rouvrit, se retrouvant seule dans la pièce. Elle se sentait perdue, et pour la première fois…un peu triste. Pitoyable petite Bethany ! Elle secoua la tête, lâcha un long soupir, puis sortit à son tour. Ce mec allait la rendre folle !

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